Mercredi, l’indicible s’est produit. Mercredi, l’impensable s’est produit. Mercredi, deux malades ont attaqué la rédaction d’un journal satyrique. Ils ont tué 12 personnes, ils en ont blessé des millions.
Depuis mercredi, comme des milliers d’autres, j’ai la gueule de bois. Je me sens meurtri, blessé, profondément, immensément triste. Je ne peux songer à ce qui s’est passé sans avoir les larmes aux yeux… Et je peux pas m’empêcher d’y penser. Alors, à force d’y penser, je me suis dit qu’il fallait que je pose toutes ces pensées quelque part. Pour faire le tri. Voilà.
Parce que c’est ce qu’ils auraient voulu, il faut qu’on reste debout. Comme eux ont su rester debout. Parce que sinon, ce sont les autres qui auront gagné, il faut qu’on reste debout. Dignes. Unis. Parce que c’est ce qu’ils auraient voulu, il faut qu’on continue de rire. Même si c’est dur. Même si, au départ, pendant longtemps sans doute, ce sera un rire triste. Parce que sinon, ce seront les autres qui auront gagné.
Parce que ce qu’ils ont attaqué, ce n’est pas qu’un canard irrévérencieux, ce ne sont pas que douze grands enfants déconneurs. Ils ont pris les meilleurs d’entre nous, le meilleur de ce que nous sommes.
Ils se sont attaqués à nos valeurs, celles de la France, celles de Charlie, les nôtres, il faut y rester fidèles. Ce sont les nôtres, à nous tous. Celles qui nous ont été légués et pour lesquelles, aujourd’hui plus que jamais, il faut qu’on se batte.
Ce sont celles de la République mais aussi celles des musulmans, n’en déplaise aux barbus. Ce sont celles de tous les Français, d’où qu’ils viennent, quelles que soient leurs origines, n’en déplaise à la blonde.
Mercredi, j’ai aussi publié une (courte) critique de “Soumission”, le dernier roman de Michel Houellebecq. Aujourd’hui, ce que je retiens de son livre, c’est que l’hypothèse d’un parti musulman (relativement) modéré proposant un candidat aux élections présidentielles de 2022 en réaction à la montée du FN, et réussisîant à le faire élire suite à un “sursaut” républicain. Cette hypothèse, à la lecture du roman, paraît presque crédible, en partie à cause des raccourcis de l’auteur (et c’est bien sa liberté d’auteur de fiction) mais aussi parce que, effectivement, aujourd’hui déjà la montée du FN fait peur.
Le malaise qu’on peut ressentir à la lecture de ce libre, c’est autant en découvrant les conséquences de cette élection (pas toutes négatives, ce qui rends l’affaire encore plus intéressante) que de se demander si, vraiment, nous sommes condamnés à devoir choisir entre la blonde et les barbus.
L’Islam, je sais que ce n’est pas cela. Pas les frères Kouachi. Pas Ben Abbes (le Président du roman). Les premiers sont des fanatiques, qui ne respectent pas le Coran, le second un personnage de fiction. Mais le FN, lui, on le reconnaît. Hier, la blonde essayait déjà d’utiliser ce malheur pour proposer le rétablissement de la peine de mort, pour demander la suspension de Schengen et des déchéances de nationalités… bref pour nier ce qu’est (j’allais écrire “qui était”, honte à moi) Charlie Hebdo. Oser faire ces propositions au lendemain de leur lâche assassinat, c’est un peu comme cracher sur leurs cadavres encore chaud.
Déjà qu’on a fait sonner les cloches de Notre-Dame pour des bouffeurs de curés, qu’on a joué la Marseillaise pour des anarchistes, ne leurs faisons pas cela en plus, ne laissons pas le FN en profiter, ne laissons pas les extrémistes nous diviser. Ce serait insupportable,
Je suis Charlie, ce n’est pas qu’une posture : c’est cela. Restons fidèles. N’ayons pas peur. Ne montrons pas nos peurs. Tenons nous droits. Ne lâchons pas une parcelle de notre liberté. Refusons les récupérations politiciennes. Rions. Achetons Charlie. Moquons nous d’eux et de nous même. Moquons nous de tous. C’est comme cela, seulement, qu’ils seront vengés.
Ce soir, je suis triste mais je suis déterminé. Pour Cabu, pour Charb, pour Honoré, pour Tignous, pour Wolinksi, pour Bernard, pour Elsa, pour Michel, pour Mustapha, pour Ahmed, pour Franck, pour Frédéric. Pour la liberté. Pour la tolérance. Pour la France. Pour nos enfants. Pour les miens. Pour moi.